Une girouette...
Je me suis fait complètement embrigader par nos amis les CGTistes...
Alors que je n'étais pas vraiment opposé à la nouvelle possibilité de remplacer nos collègues, j'ai maintenant décidé d'être contre...
Normalement, cette réforme devrait permettre aux professeurs de participer à la continuité de l'enseignement... Complètement débile...
Si l'on remplace un professeur de notre matière dans une classe qui ne nous est pas confiée de manière générale, on ne participe en rien à la continuité pédagogique... Au contraire, on intervient de manière inopinée, dans la progression pédagogique de son collègue, au risque de rendre floues certaines notions et méthodes...
Si l'on remplace un professeur dans une classe que nous avons habituellement sous notre responsabilité... Il s'agit bien entendu de donner des cours dans notre matière... Le problème, c'est sans doute que l'on peut être désigné pour effectuer un remplacement... Les remplacements peuvent être obligatoires... Et il peut être possible que notre proviseur nous demande de faire jusqu'à cinq heures de remplacement par semaine... Surtout qu'en lycée pro, les profs d'enseignement pro disposent de groupes d'heures... Donner quatre heures à la suite de français ou d'histoire, cela relève de l'utopie...
Mais surtout : en ce moment, je suis incapable de faire une seule heure de cours supplémentaire... Je passe mes soirées et mes week-ends à préparer des cours pour qu'ils soient adaptés aux têtes vides dont disposent mes élèves... Je ne m'octroie qu'une soirée par semaine (mon sacro-saint samedi)... Donc si mon proviseur adjoint me demandait de faire, ne serait-ce qu'une heure de plus par semaine, je me verrais obligé de l'envoyer se faire enculer... (Si possible par moi)
De plus, c'est l'esprit de la réforme... Le fait de vouloir à tout prix faire bosser davantage les profs (tout le monde le pense : on ne travaille pas assez) sans pour autant augmenter leurs salaires... Le fait d'utiliser les professeurs comme gardes-chiourme... Nous ne sommes pas là pour enseigner à des élèves, mais pour les empêcher de braquer des petites vieilles dans la rue en les parquant dans des salles surchargées...
Du coup, j'ai décidé de boycotter la réunion de demain... Qui ne servira pas à discuter de l'intelligence de cette mesure... Mais à discuter du protocole d'application... Bah oui, la loi est votée... On n'a plus qu'à l'appliquer...
Le genre de discussion qui préoccupe mes soirées jusqu'à tard le soir :
Un élève qui d'habitude est autiste... Aujourd'hui, je le surprends en train de s'amuser à lancer des boulettes de papier... Je lui demande son carnet... Il refuse, prétendant qu'il n'est pas le seul à s'adonner à cette pratique (Quand je ne suis pas garde-chiourme, je fais aussi office de surveillant de garderie)... Je lui demande de venir à la fin de l'heure... Il s'exécute, heureusement... Discute, discute, m'intéresse à lui, à ses sentiments quant à ma matière (il déteste), quant à l'école (il est contre), quant à ses camarades (ils se foutent de sa gueule, apparemment, parce que sa mère s'habille de manière trop sexy ; ils disent que c'est une pute)... J'en arrive à la question : Mais pourquoi viens-tu en cours ?
Lui, sérieusement : Pour les allocs...
Moi, essayant de ne pas être outré : Tu essayes d'être provocant ou insolent ?
Lui : Nan mais si on avait pas les allocs, ma mère... Enfin, faudrait qu'elle bosse davantage... Et puis son boulot...
Moi, intérieurement, je n'arrive pas à ne pas penser qu'elle se prostitue peut-être vraiment... Je ne lui ai pas donné l'heure de retenue qu'il méritait... Je suis nul... Quand je vous dis que je n'ai aucune autorité...